Vous êtes ici

Abattoirs : des outils en quête de solutions

Depuis cinq ans, le volume d'activité des abattoirs régionaux est en baisse. Crédit photo : A.Coronel, pour perdre 8 % de leur activité par rapport à 2018
Depuis cinq ans, le volume d'activité des abattoirs régionaux est en baisse. Crédit photo : A.Coronel, pour perdre 8 % de leur activité par rapport à 2018

L'organisme de la statistique agricole Agreste a publié récemment une étude sur les abattoirs en Bourgogne-Franche-Comté. Entre baisse de certains cheptels et implication des collectivités, ces entreprises cherchent à assurer leur pérennité.

Liée à la vitalité des filières d'élevage de races à viande, la question de l'avenir des abattoirs en France se pose de manière aiguë. En Bourgogne-Franche-Comté (BFC) entre fragilisation, manque de rentabilité ou obsolescence de certains outils d'abattage, prise en main des dossiers par des collectivités ou des collectifs d'agriculteurs, le secteur est à la croisée des chemins. Agreste, l'organisme de statistique du ministère de l'Agriculture, vient de livrer une étude sur l'état des abattages régionaux dont nous livrons ici un résumé. Notre région disposait en 2023 de 15 abattoirs de gros animaux, pour une production régionale totale de près de 137 000 Tonnes équivalent carcasses (TEC). Malgré la forte hausse de l’activité d’abattage entre 2006 et 2018, au cours de laquelle la région était passée de 124 000 à 149 000 TEC par an, les volumes traités ont depuis subi cinq années de baisse consécutives, pour perdre 8 % de leur activité par rapport à 2018.

Un réseau en diminution

Entre 2005 et aujourd'hui, le nombre d'abattoirs en BFC est passé de 23 à 15,67% des volumes régionaux sont abattus sur trois sites qui traitent annuellement plus de 20 000 TEC par an. L’abattoir de Cuiseaux, en Saône-et-Loire, produit plus de 40 000 TEC par an, soit 32% des volumes régionaux. Les deux autres abattoirs importants de la région (Valdahon, dans le Doubs et Migennes, dans l'Yonne) traitent 23 000 et 24 000 TEC par an, soit environ 17 et 18 % des abattages de BFC. La région dispose également de deux abattoirs de taille moyenne, à Venarey-les-Laumes (Côte-d’Or) et Besançon (Doubs), qui traitent entre 10 000 et 15 000 TEC par an. On trouve enfin 10 abattoirs locaux, traitant de l’ordre de 5 000 TEC ou moins par an. La répartition de l’ensemble des abattoirs régionaux forme ainsi un bon maillage territorial. Les bovins représentent la très grande majorité de l’activité des abattoirs de BFC (75 % du tonnage), tandis que les porcins n’en représentent que 22 %. Parmi les 3 % restants, 2 % sont occupés par les ovins-caprins, et 1 % par les équins et autres espèces. Les abattoirs font face à de nombreux défis : charges de fonctionnement, approvisionnement en animaux dans un contexte de décapitalisation des cheptels, ou ressources humaines. Cela a pu conduire à la fermeture de certains outils, comme à Corbigny (Nièvre), en 2021. Néanmoins, ce site bénéficie aujourd'hui d'une tentative de relance de son activité portée par les collectivités locales : des travaux de réhabilitation ont débuté en septembre 2024 et la réouverture est prévue pour la mi-2025. Des réflexions sont aussi en cours pour restructurer les abattoirs de Cosne-sur-Loire (Nièvre) ou Perrigny (Jura).

Forces centrifuges

Il faut aussi prendre en compte la forte influence des départements limitrophes de la BFC. Il existe trois abattoirs de grande taille implantés à proximité : celui de Lapalisse, dans l’Allier et celui de Fleury-les-Aubrais, dans le Loiret. Ils traitent exclusivement des porcins et sont des destinations privilégiées pour les porcs sortant de Bourgogne. Le troisième abattoir proche important est celui de Bourg-en-Bresse dans l’Ain qui traite principalement des porcins, mais également des bovins et des ovins. Les bovins issus des exploitations de BFC représentent 53 % des volumes des abattoirs régionaux. Au cours des dernières années la filière bovine a été particulièrement touchée par un phénomène de décapitalisation. Ce déficit en animaux est préjudiciable pour les abattoirs, qui sont calibrés pour traiter un tonnage donné d’animaux, ce qui accentue la concurrence entre les établissements. A cela s'ajoute, depuis trois ans, l'envol des cotations bovines. 

Face à ces difficultés, les établissements mettent en place plusieurs stratégies. Certains, liés à l’aménagement du territoire, peuvent s’inscrire dans un Projet alimentaire territorial (PAT). Dans ce cadre, ils renforcent la vente de proximité en s’appuyant, par exemple, sur la restauration collective. Ils peuvent également s’associer à des collectivités grâce au statut de Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). D’autres, appartenant à des groupes privés, mettent en place des stratégies afin de saturer leurs outils, par exemple en réduisant le volume de bovins d’un premier abattoir au profit des ovins, et en transférant à un second les bovins libérés. La filière porcine est la deuxième de la région en termes de volumes de gros animaux abattus. En 2023, 30 000 TEC de porcs, dont 99 % sont des porcs charcutiers, ont été abattues en BFC, ce qui est nettement inférieur au volume sortant des exploitations de la région (presque 38 000 TEC, dont 98 % de porcs charcutiers). Comptant pour 2 % des abattages régionaux d’animaux de boucherie, les petits ruminants sont la troisième filière de gros animaux de la région. A l’instar des porcins, les productions des exploitations régionales (6 300 TEC en 2023, dont 95 % d’ovins) sont nettement supérieures aux abattages (3 700 TEC). Près de 90 % des abattages ovins de la région sont réalisés dans l’Yonne.

 

La question de la distance à parcourir

En BFC, les distances que doivent parcourir les bovins sont assez hétérogènes. Si la plupart des animaux venant du Val de Saône font en moyenne moins de 100 km à vol d’oiseau (en raison notamment de la proximité de l’abattoir de Cuiseaux), les distances parcourues par les animaux de l’Est et de l’Ouest de la région sont beaucoup plus importantes. A l’Ouest, en particulier dans la Nièvre et dans l’Yonne, et malgré la proximité de l’abattoir de Migennes, les animaux de nombreuses communes effectuent en moyenne plus de 100 km, voire plus de 200 km pour se faire abattre. Concernant les autres filières, les différences de distance à l’abattoir sur la région sont moins marquées. Les porcins sont globalement abattus à moins de 100 km de leur exploitation d’origine (un peu plus dans l’Yonne en raison de l’abattoir de Fleury-les-Aubrais). Les petits ruminants sont, quant à eux, abattus à moins de 200 km de leur exploitation.