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Salaire différé

Salaire différé : une déclaration de créance entre les mains du notaire chargé du règlement d'une succession n'interrompt pas la prescription

Le salaire différé est dû à l’occasion de la liquidation de la succession d’un exploitant agricole au descendant de ce dernier qui, âgé de plus de 18 ans, participe directement et effectivement à l’exploitation sans être rémunéré. La créance de salaire différé est limitée à 2/3 du SMIC et à une période de participation aux travaux de 10 ans maximum.

Cette mesure est d'abord motivée par un souci d'équité. La créance de salaire différé permet de rétablir un certain équilibre entre l'enfant qui a fait prospérer l'exploitation familiale sans tirer un revenu de son travail et les autres enfants.

La loi énonce successivement que la créance de salaire différé peut être réclamée par le descendant d'un « exploitant agricole » et que le créancier exerce son droit « après le décès de l'exploitant et au cours du règlement de la succession ».

Perçues sous l'angle du débiteur, ces dispositions permettent d'affirmer :

  • que la dette de salaire différé est liée à l'activité agricole d'un ascendant ;
  • qu'elle n'est exigible qu'au décès de l'ascendant qui a la qualité d'exploitant. Mais un règlement peut intervenir du vivant de l'ascendant.

En cas d'époux coexploitants, le descendant peut poursuivre le règlement de la totalité de sa créance de salaire sur l'une ou l'autre des successions.

L'action en reconnaissance de la créance de salaire différé ne se prescrit plus par 30 ans à compter de l'ouverture de la succession de l'exploitant mais par 5 ans. Cette réduction de la durée de la prescription qui résulte de la loi du 17 juin 2008, s'applique aux prescriptions en cours à compter du 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder 30 ans. Si une instance a été introduite avant cette date, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne.

La suppression de l’exonération fiscale et sociale est applicable aux sommes attribuées aux héritiers d’exploitants agricoles qui participent directement et gratuitement aux travaux d’exploitation après le 30 juin 2014.

Notons que le salaire différé attribué au conjoint de l’exploitant n’est pas impacté par la mesure puisque qu’il ne bénéficie d’aucune mesure d’exonération.

Depuis, les salaires différés perçus, tant par le descendant de l’exploitant que par le conjoint de ce dernier, sont soumis pleinement à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires et à la CGS/CRDS sur les revenus d’activité.

La décision de la cour de cassation du 2 mai dernier a été l’occasion de préciser que lorsque la déclaration de créance de salaire différé est entre les mains du notaire chargé du règlement d’une succession, cela n’interrompt pas la prescription.

C’est en violation du Code de procédure civile que l’arrêt d'appel a fixé la créance de salaire différé de la fille prédécédée des défunts à la somme de 26 152 euros et dit que cette somme sera prélevée sur la succession avant tout partage et attribuée au fils de la créancière prédécédée. Pour écarter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance de salaire différé, après avoir énoncé que la prescription courait à compter du 11 novembre 2011, date du décès de la défunte, l’arrêt d'appel retient que le fils de la créancière justifie que la créance a été déclarée auprès du notaire chargé du règlement de la succession, le 31 mai 2013. Or, une déclaration de créance entre les mains du notaire chargé du règlement d'une succession n'interrompt pas la prescription.