L’histoire, le paysage et la réputation de Fougerolles ont été façonnés par la distillation d’eau-de-vie à partir des cerises : vergers, manufactures, festivités… font perdurer ces traditions ancestrales. Les producteurs de cerises de l’aire d’appellation d’origine contrôlée Kirsch de Fougerolles invitent le grand public à découvrir les cerisiers en fleurs lors d’un évènement organisé le samedi 22 avril 2023.
Un haïku (forme de poésie brève originaire du Japon) de Kobayashi Issa peut évoquer le sentiment de féérie qui émane de la vision de cerisaie en fleur, illuminée par un rayon de soleil, sur les coteaux fougerollais.
Être rien qu'en vie
à l'ombre des cerisiers
cela est miracle.
Rendez-vous est donné le 22 avril prochain à 10h30 sur la place du champ de foire à Fougerolles (devant la salle des fêtes). Les producteurs guideront les participants vers quelques-uns des plus beaux vergers de cerisiers typiques du paysage Fougerollais. Explications, conseils, ces professionnels seront à la disposition du public pour échanger sur le greffage, les différentes variétés de cerises, etc...
Chacun est invité à apporter son pique-nique pour profiter d’un déjeuner à l’ombre des cerisiers. Les producteurs d’apéritifs locaux offriront leurs spécialités à la dégustation et une collation « surprise » sera servie à l’Ecomusée du Pays de la Cerise à Fougerolles à l’issue de la journée.
Fougerolles est une commune située au nord de la Haute-Saône, sur l’axe qui relie Luxeuil-les-Bains à Remiremont, dans les Vosges. En 2019, elle a fusionné avec Saint-Valbert. L’occupation de ce site par les hommes est ancienne, comme l’atteste la découverte d’une hache en bronze à ailerons médians à La Vaivre, datée de l’époque préceltique… Certains historiens voient aussi dans les pierres erratiques qui parsèment le territoire des monolithes témoins d’une occupation celte, tandis que d’autres n’y attribuent que les effets de l’érosion dans un grès très gélif. Historiquement parlant, la plus ancienne mention écrite de Fougerolles, sous la forme Fulgeriolis remonte à 1 150. Il s’agirait d’une évolution du mot latin "foliaris", qui signifie "qui est couvert de feuilles", soit une possible référence à la densité de la végétation dans la région, notamment la présence de fougères. Un toponyme qui fait écho à d’autres noms de lieux en France, comme Fougeré dans le Maine-et-Loire, Fougerêts dans le Morbihan ou encore Fougères en Ille-et-Vilaine.
Des cerisiers pour lutter contre les fougères ?
Bien que cette hypothèse n’ait pas été étayé scientifiquement, il est possible que les cerisiers aient été plantés dans la région pour aider à réduire la croissance de la fougère et améliorer la qualité du sol pour d'autres cultures : les cerisiers sont en effet connus pour libérer des substances chimiques appelées phytotoxines, qui peuvent inhiber la croissance d'autres plantes. Mais bien entendu, l’implantation des cerisiers a probablement répondu à de multiples besoins : production de petits fruits, ombrage du bétail… et distillation ! On dit qu’il y a aujourd’hui 40 000 cerisiers sur le territoire de la commune, et le cahier des charges de l’AOC obtenue en 2017 ne dénombre pas moins d’une quarantaine de variétés locales homologuées : « Queue Fourchette », « Rouen », « Riggi », « Rouge de chez Colle », « Sacristaire », « Saint Valbert », « Tinette »… Poésie quand tu nous tiens !
L’ouvrage de Pierre Grandjean paru en 1979, intitulé « Fougerolles : son patois, son folklore, ses traditions populaires, ses coutumes », constitue une somme incontournable pour qui s’intéresse au patrimoine fougerollais. Il fait le lien entre la toponymie, les usages et les mœurs des habitants de ce secteur bien particulier. Il retrace l’histoire des défrichements monastiques, des disputes pour ce territoire aux confins des aires d’influence du souverain de Lorraine et de l’archevêque de Besançon…. Il narre aussi les fêtes locales, le calendrier rythmé par les moissons et les récoltes, les figures locales de saints et de contrebandiers. Par exemple, avant la première guerre mondiale, la « fête au chik » du Champ, relatée par Marcel Saire : « Tout le monde s’attablait en plein air ou dans les granges ; hommes femmes et enfants dévoraient d’énormes tartines de fromage blanc, salé ou aillé suivant les goûts et buvaient du ‘’chien’’, alcool de betterave à 90 dédoublé, soit à 45°C Il y avait un ou deux bals, un manège de chevaux de bois entraîné par un cheval, des balançoires… des marchands de bonbons, de sucre d’orge, de guimauve, de ballons de mirlitons. » Le chik est du fromage blanc, alors fabriqué dans chaque ferme et consommé pour le goûter, tartiné sur du pain noir arrosé d’eau de vie.
Un écomusée réputé
Au hameau du petit Fahys, l’écomusée de Fougerolles est justement consacré à l'histoire et aux traditions de la ville de Fougerolles et de sa région, notamment celles liées à la production de la célèbre liqueur de cerises. Tout un écosystème industriel s’était développé autour du kirsch : tonnellerie, verrerie, vannerie… Ce musée est d’ailleurs installé dans un ancien bâtiment industriel, qui abritait autrefois une distillerie. Cet endroit propose une exposition permanente sur l'histoire de la ville et de ses habitants, ainsi que sur les techniques de production du Kirsch. On y trouve également des collections d'objets liés à la vie quotidienne et aux métiers traditionnels de la région, tels que des outils agricoles, des costumes traditionnels ou encore des meubles anciens.