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Loi foncière : à la recherche d’un équilibre

Champ de céréales
Champ de céréales

La loi de régulation foncière sera examinée le 5 novembre prochain par les sénateurs. Son objet est un meilleur contrôle des cessions de terres via des part sociétaires… pour éviter leur accaparement, éventuellement par des sociétés étrangères. Le point avec le sénateur Olivier Rietmann, rapporteur de la proposition de loi.

Le 26 mai 2021 l’Assemblée nationale votait un texte parlementaire présenté par le député des Hautes-Pyrénées, Jean-Bernard Sempastous. L’essentiel de sa proposition de loi visait à faire valider par les préfets le transfert des terres par la mécanique de la cession des parts sociales, qui échappait jusqu’à maintenant aux contrôles.

Quels sont le contexte et les enjeux de cette loi de régulation foncière ?

Olivier Rietmann, sénateur de Haute-Saône et rapporteur de la proposition de loi : le candidat Macron avait promis une grande loi foncière, qui n’a pas été réalisée… et c’est donc un texte ‘’a minima’’, qui ne porte que sur le contrôle des structures sociétaires qui est proposé par la majorité présidentielle. Il sera examiné au Sénat le 3 novembre en séance publique. En arrière-plan, l’achat de 2 600 ha par un investisseur chinois avait mis en évidence la nécessité de davantage encadrer les transactions sociétaires, face au risque d’accaparement des terres agricoles. D’autant plus que les exploitations agricoles sont désormais de plus en plus sociétaires : GAEC, EARL, SCEA…

Que contient concrètement cette proposition de loi ?

Pour répondre au double objectif de faciliter l’installation de jeunes agriculteurs et la transmission des exploitations et d’éviter l’accaparement ou de concentration excessive des terres, la loi introduit un système de contrôle. Une procédure d’autorisation de cessions de parts de société sera enclenchée en cas de projet portant à la fois sur plus de 40% des parts et de surface d’exploitation supérieure à un certain seuil, défini selon les départements et les productions. Elle prévoit que la SAFER montera alors un dossier d’instruction, destiné au préfet de région, qui rendra un avis, positif, négatif ou conditionnel, avec par exemple une contrepartie portant sur l’obligation de libérer un pourcentage des terres concernées par la transaction pour conforter une exploitation existante ou installer un JA.

Dans quel esprit avez-vous travaillé pour amender cette proposition de loi ?

Nous avons voulu trouver un équilibre entre tous les acteurs. Pour conserver une agriculture familiale, mais sans se priver pour autant de capitaux extérieurs. Il ne faut pas que cette loi paralyse le marché foncier… La première proposition, c’est que la décision soit prise par le préfet de département, plus à même de prendre en compte les réalités locales. La deuxième, c’est de retirer à la Safer la possibilité d’acquérir les terres en question, pour qu’elle ne soit pas à la fois juge et partie dans ces dossiers. L’idée est de garantir que les SAFER travaillent de manière transparente et sans conflits d’intérêts éventuels.

Nous avons aussi souhaité donner davantage de souplesse au niveau du seuil de déclenchement qui sera fixé par le schéma départemental des structures – initialement de 1 à 3 fois la surface agricole utile régionale moyenne (SAURM) – à quatre fois cette SAURM, ce qui nous paraît plus en adéquation avec la réalité du marché foncier.

Enfin, nous avons aussi introduit des exceptions à ce dispositif : si c’est un parent jusqu’au 4ème degré qui est acquéreur, ou bien le conjoint ou le partenaire de PACS, un associé de l’exploitation depuis 9 ans ou encore un salarié ou un apprenti depuis trois ans. Enfin nous avons voulu supprimer l’article concernant les sociétés foncières, article qui dans les faits ne concernait que la foncière Terre de liens, et allait contre le principe d’universalité de la loi. Nous introduisons également la notion de montant forfaitaire à acquitter par le vendeur et l’acquéreur, pour compenser les charges liées à l’instruction du dossier. Et pour terminer, nous souhaitons que ce dispositif soit réévalué dans les trois ans après son entrée en application, afin d’être en mesure d’y apporter d’éventuels ajustements, si nécessaire.