Bovins viande / Devant les éleveurs de Bourgogne Franche-Comté réunis à Dracy-Saint-Loup, le président de la FNB Bruno Dufayet a révélé l’étrange comportement de la filière et du gouvernement face à l’asphyxie de l’élevage allaitant. Constatant l’échec de toutes les démarches constructives, la profession n’a plus d’autre choix que de durcir le ton.
Vendredi dernier, la fédération nationale bovine (FNB) a fait escale en Saône-et-Loire dans le cadre de sa tournée régionale Bourgogne Franche-Comté. Le président de la FNB, Bruno Dufayet, a rendu compte des actions nationales face à une situation dramatique de l’élevage. Son discours sans langue de bois a donné un éclairage souvent saisissant sur les comportements tant de la filière que du pouvoir politique…
« Cela fait 17 ans que je suis installé et on ne voit pas le bout du tunnel ». Tels étaient les mots d’accueil de Thomas Brusson qui, en une phrase, synthétisait tout le désarroi d’une profession en grand danger. La dégradation chronique des prix de vente pendant que les charges ne font qu’augmenter amène à un « constat dramatique », confirmait Bruno Dufayet. « En 2020, le revenu moyen annuel des éleveurs allaitants a chuté de 25 % pour atteindre moins de 8.000 € ! En perpétuelle baisse, ce revenu a chuté de 33 % entre 2017 et 2020. Une alerte comme on n’en a jamais connue », déplorait le président.
Constat d’échec
Devant cette crise sans précédent, qui n’a jamais cessé de s’amplifier depuis des années, Bruno Dufayet ne cachait pas « le constat d’échec » ressenti à la FNB. « On a tenté plein de choses, mais personne ne veut avancer », se désolait le représentant national qui, assumant « un discours de vérité », n’hésitait pas à parler du spectre « d’un abandon de production. À un tel niveau de revenus, il faut être honnête, on ne va plus prôner un discours d’installation ! », lançait-il.
À la source de la problématique de revenus, il y a ces fameux dysfonctionnements propres à la filière bovine qui agacent tout le monde depuis des années…. « Globalement, tous les indicateurs de marché sont au vert : une bonne année export en volume (+1 % sur l’Italie) ; une consommation de viande bovine française en hausse (le steak haché star) ; des vaches finies qui partent bien ; une situation du jeune bovin assainie avec désormais un sous-stock… ». Et pourtant, « les prix payés aux producteurs sont toujours aussi bas », déplorait Bruno Dufayet. Et ce alors même que la décapitalisation se poursuit. À l’autre bout de la chaîne, « les distributeurs parviennent toujours à passer 3 % de hausse par an sur les prix aux consommateurs ! Comme quoi, l’alibi du pouvoir d’achat est une tromperie », faisait remarquer le président de la FNB.
Le mépris du gouvernement
« Quand les règles de marché n’opèrent plus », à tel point que le revenu des éleveurs est devenu indécent, « le rôle d’un ministre, c’est de les protéger », estime le président de la FNB. Malheureusement, ce dernier est bien placé pour savoir le « mépris » manifesté par le gouvernement… Plutôt que de se contenter de renvoyer la profession aux querelles internes de filières en insultant au passage les intéressés de noms d’oiseaux, « le courage politique serait d’imposer un prix qui intègre les coûts de production pour sauver les exploitations », suggérait Bruno Dufayet. Vingt euros par foyer français et par an suffiraient pour enfin rémunérer le travail des éleveurs, fait-on valoir à la FNB.
Sauver le couplage pour sauver l’élevage…
Les perspectives ne sont pas plus réjouissantes concernant les négociations de la nouvelle Pac. « Les intentions du ministère ne sont pas bonnes du tout. Cela ne va pas dans le sens de l’élevage », révélait le président de la FNB. Avec des éleveurs à moins de 8.000 € par an, la FNB se bat pour sauver le couplage. Car la menace, c’est que des aides soient prises aux bovins pour être attribuées à la filière protéine végétale…, révèle-t-on à la FNB.