Engager la responsabilité de l’État en cas de carences du contrôle des services vétérinaires : c’est simple ?
Les services vétérinaires d’inspection assurent, au nom de l’État, la surveillance et le contrôle des abattoirs. Le tribunal administratif de Dijon reconnaît que la responsabilité de l’État peut être engagée à raison d’une carence fautive selon le régime de la faute simple.
Selon l’article L. 214-1 du Code rural et de la pêche maritime, les animaux sont des êtres sensibles qui ne doivent pas être soumis à des mauvais traitements. L’association L214, dédiée, au terme de ses statuts, à la protection animale a sollicité la condamnation de l’État en raison des manquements commis dans l’exercice de ses missions de contrôle d’un abattoir.
La France a une obligation de résultat
L’État est chargé, dans son contrôle du respect des règles européennes et nationales en matière de protection et de bien-être animal, notamment de prendre des mesures pour éliminer ou maîtriser les risques pour le bien-être des animaux.
Ces mesures, prises par les agents de l’État sous la surveillance continue desquels s’opèrent abattages et étourdissements, peuvent aller d’un simple rappel à un arrêt de la production. La fermeté et la progressivité des mesures à prendre en cas de manquement aux règles applicables à la protection et au bien-être animal instituent ainsi une obligation de résultat pour les États membres de l’Union européenne.
La responsabilité de l’Etat désormais engagée pour faute simple
Dans le présent litige, le tribunal administratif de Dijon, reconnaît expressément un régime d’engagement de la responsabilité des services de l’État, dans leur contrôle du respect de ces règles, sur le fondement de la faute simple. Ce choix se justifie au regard de la nature des pouvoirs conférés à ces autorités et de leur finalité, qui disposent d’une « large marge d’appréciation » dans le choix des mesures à mettre en œuvre pour éliminer ou maîtriser les risques pour le bien-être des animaux. Cette décision du 23 avril dernier s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle tendant à étendre le régime de la faute simple, alors que les difficultés rencontrées par les organes de contrôle avaient conduit à n’admettre traditionnellement leur responsabilité qu’en cas de faute lourde.
La faute simple suffit en effet désormais à engager la responsabilité de l’État dans l’exercice, notamment, de ses missions de contrôle en matière d’hygiène et de sécurité, réglementation de l’amiante ou en matière de police sanitaire relative aux médicaments.
Le tribunal retient ensuite, au cas d’espèce, des séries de carences fautives constituées par l’insuffisante intervention des services d’inspection pour faire cesser plusieurs manquements commis au sein de l’abattoir, notamment dans le contrôle de l’utilisation d’appareils soumettant les animaux à des chocs électriques ou l’absence d’alimentation des animaux demeurant en attente plus de douze heures avant d’être abattus.
L’Etat condamné à verser la somme de 2000 euros au titre du préjudice moral
Il condamne, en conséquence, l’État à verser à l’association L214 la somme de 2 000 euros au titre de son seul préjudice moral, eu égard à l’atteinte portée aux intérêts qu’elle s’est donné pour mission de défendre. Toute défaillance de contrôle par les services de l’État en matière de protection et de bien-être animal engage ainsi la responsabilité de ce dernier, sur le terrain de la faute simple.