Vous êtes ici

Guinguette des Chavannes : fragrances de bonheur

L'accordéoniste est le pillier du bal-musette : avec l'électronique et les boîtiers, c'est devenu un homme orchestre. Crédit photo : AC
L'accordéoniste est le pillier du bal-musette : avec l'électronique et les boîtiers, c'est devenu un homme orchestre. Crédit photo : AC

A Velle-le-Châtel, la guinguette des Chavannes perpétue la tradition des bals, thés dansants et autres dancings… pour le plus grand plaisir des amateurs de convivialité qui viennent passer de bons moments dans une ambiance chaleureuse et bon enfant.

Le mot guinguette évoque une foule d’images et convoque inévitablement tout un univers fantasmagorique : scènes de romans policiers, pour les amateurs du genre, avec par exemple l’enquête du commissaire Maigret intitulée « la guinguette à deux sous », sous la plume de Simenon… petit chef-d’œuvre du genre, sur fond de chantage, adultères et beuveries en bord de Seine. Les amoureux de chanson française se souviendront avec tendresse de l’émotion contenue de Bourvil chantant « le petit bal perdu ». Après avoir été un motif pictural prisé des plus grands noms de la peinture, avantageusement représentée dans les tableaux de Renoir, Monnet… la guinguette a aussi beaucoup servi de décor de cinéma. Témoin la supplique immortelle « Allez, danse, Marie ! » lancée par les compagnons de la belle Casque d’or, incarnée dans le film de Jean Becker par Simone Signoret. Poussée par la ferveur ambiante, Marie accepte de valser avec Roland, chef des Apaches ; elle croise à chaque tour de piste le regard brun de Manda, joué par Serge Reggiani… Et c’est le coup de foudre ! Et le début d’une des plus belles histoires d’amour du cinéma.

Un motif légendaire

Francis Caria n’a pas toujours été tenancier de la guinguette des Chavannes. « Avant, j’étais dans la menuiserie et l’agencement… à mon compte, se souvient-t-il : j’ai commencé la guinguette en parallèle, avec ma femme, le week-end, en plus de mon activité professionnelle, en 2002 à Grattery. Il faut dire que j’ai été pendant 20 ans président de club de foot, à Pusy, Montigny… ce qui fait que nous avions l’habitude d’organiser des banquets et de faire à manger pour de grandes tablées ! J’ai fréquenté aussi la Gabiotte, à Fougerolles [un restaurant-cabaret réputé NDLR], et j’étais sûr qu’il y avait quelque chose à faire dans le genre d’une guinguette  » Passionné de bal musette, de danse et d’ambiances conviviales, le couple se lance pleinement dans l’aventure en 2007, en se professionnalisant complètement. « Comme nous étions un peu coincés à Grattery, nous avons acheté l’entrepôt désaffecté de l’entreprise Philiponet pour le transformer entièrement. » L’ancien menuisier a complètement rénové le bâtiment : isolation, peinture, décoration, électricité… « Nous avons tout refait à notre goût, et aux normes actuelles. » De l’établissement de Grattery où ils ont fait leurs débuts, Marie-Ange et Francis Caria conservent le nom : les Chavannes. « C’est le nom de l’ancien hameau où nous avons commencé : c’est un peu notre marque de fabrique. » Le nouveau lieu est polyvalent : grande salle de bal, bien entendu, mais aussi une salle de restauration pour les évènements professionnels ou familiaux, terrasse extérieure, sans oublier l’hôtellerie (9 chambres). « Nous faisons hôtel-restaurant : le restaurant est ouvert tous les jours du lundi au vendredi », relate Francis Caria, amoureux des bons produits et attaché à proposer un menu financièrement accessible. Mais l’établissement est principalement connu pour sa guinguette ! « Nous sommes ouverts tous les dimanches et jours fériés », lance le patron, pas mécontent d’avoir réussi à fidéliser une clientèle amatrice d’après-midi dansants et bals-musette. « On a eu des têtes d’affiche qui nous ont aidé à nous faire connaître, comme André Verchuren, Gilou… le bouche-à-oreille, la publicité, ça prend du temps mais ça finit par payer ! »

Une convivialité familiale

Le cachet de l’établissement, c’est principalement la convivialité bon enfant qui y règne. Les fidèles savent qu’ils vont y passer un bon moment, au son de l’accordéon. « J’ai 19 accordéonistes au programme, la plupart pour au moins deux dates. Nous avons des musiciens qui viennent des Vosges, du Doubs, de Côte-d’Or et des artistes locaux. C’est ici que Florent Gorris a fait ses premières armes… il n’avait que 16 ans ! » Cette bonne ambiance familiale est un phare pour de nombreuses associations et clubs de retraités bien actifs, comme l’association des retraités des PTT. Sans oublier les organisations caritatives, comme l’Unicef, qui trouvent ici un cadre propice à leurs collectes de fond. Très affecté par une sérieuse alerte de santé, Francis Caria a décidé de tourner la page et de confier la guinguette des Chavannes à de nouvelles mains. « J’ai retrouvé la forme, c’est un miracle, mais depuis je vois la vie autrement et j’ai envie de profiter un peu de mes enfants et de mes petits-enfants », confie-t-il. Des pourparlers et des négociations sont en cours… croisons les doigts pour que cette belle entreprise de divertissement perdure !

Etymologie

Un vin nerveux qui donne envie de danser

Le mot "guinguette" évoque immédiatement l'image de lieux animés, où la musique, la danse et la convivialité règnent en maître. Mais d'où vient ce terme si évocateur ?

Les étymologistes ont proposé plusieurs hypothèses sur l'origine du mot "guinguette". L'une d'entre elles suggère un lien avec le "guinguet", un vin légèrement acide et bon marché que l'on consommait dans les guinguettes. Un régime fiscal avantageux favorisait d’ailleurs les débits de boisson des faubourgs parisiens au XIXème siècle… Cette boisson, peu coûteuse mais rafraîchissante, était souvent servie dans ces établissements populaires, contribuant à l'ambiance festive qui y régnait.

Une autre hypothèse fait référence aux verbes familier "guinguer/giguer/guiguer’' (guincher en franc-comtois), qui signifient ''danser avec un rythme appuyé''. Catherine Vialard, auteur de l’ouvrage « les guinguettes à la carte », date les premières guinguettes du début du 18ème siècle et précise que l’on y dansait et que l’on y servait à boire, mais pas encore à manger. Certains pensent que les guinguettes tirent leur nom de l'association de la danse et du plaisir qu'elles offraient à leurs clients. En effet, les guinguettes étaient des endroits où l'on venait se divertir, danser et oublier les soucis du quotidien. Quelle que soit son origine exacte, le mot "guinguette" est devenu synonyme de détente, de joie de vivre et de moments partagés entre amis. Aujourd'hui encore, les guinguettes continuent de perpétuer cette tradition festive, rappelant à chacun l'importance de profiter des plaisirs simples de la vie.

Francis et Marie-Ange Caria tiennent la Guiguette des Chavannes depuis 15 ans. Crédit photo : Alexandre Coronel
Le bar, où se déploient conversations de comptoir, et plus sérieuses à l'occasion ! Crédit photo : AC
Entre Vesoul et Noidans-le-Ferroux, sur la D13, l'établissement fait restaurant en semaine, et guinguette le dimanche après-midi. Crédit photo : AC
Sur la piste de danse, les amoureux du rythme s'élancent sur les airs de marches, javas, paso doble... Crédit photo : AC