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Agronomie : fertilité des sols prairiaux

La méthode pepone permet d'observer le profil cultural du sol. Crédit photo : Marion Churout
La méthode pepone permet d'observer le profil cultural du sol. Crédit photo : Marion Churout

Les conseillers bio de Haute-Saône ont profité de cet automne pour proposer aux agriculteurs deux journées techniques sur la fertilité des sols en polyculture élevage suivi d’une formation sur ce même thème courant de l’hiver. Ces deux journées qui auront réuni 25 agriculteurs environ, ont permis de remettre à plat les piliers de la fertilité d’un sol.

La fertilité du sol est fondée sur le recyclage des matières organiques prises en charge par l’activité de la vie du sol. La nature du sol mais aussi les pratiques peuvent influencer fortement cette activité biologique et donc la capacité du sol à nourrir la culture en place.

Des éléments indispensables à la vie

On le rappelle, en système bio, pas d’engrais de synthèse, autrement dit, pas d’éléments nutritifs directement assimilables par la plante, ces derniers n'étant fournis que par des apports organiques. La fertilité dans un sol est la résultante de réactions chimiques pour transformer de la matière organique en éléments minéraux afin de nourrir la plante et de la faire croitre. Ces réactions, regroupés sous l'appellation de minéralisation sont à leur optimum lorsque les facteurs propices à la vie du sol sont réunis. Comme ils pourraient l’être pour faire lever le pain, ou fermenter le vin, on entend par là une température douce, un pH proche de la neutralité, une humidité ambiante, et de l’oxygène. Mais tous ces agents du sol ont plus que tout besoin de se nourrir pour travailler sans répit. On compte environ 5 à 8 UGB de microorganismes par hectare sous nos pieds. Plus la nourriture est diversifiée et abondante, mieux c’est ! C’est pour cela que l’on parle non pas de LA matière organique mais DES matières organiques. Suivant sa composition la matière organique n’a pas la même capacité à être digéré par le sol.

Un système racinaire prairial qui se concentre en surface

La méthode pépone, qui consiste à soulever une portion de sol avec deux fourches transpalettes permet d’avoir une vision objective de ce qui se passe sous nos pieds. Avec ses nombreuses années d’observation Christian Barnéoud, pédologue à la chambre d’agriculture régionale, témoigne que « l’origine des problématiques se concentre généralement dans les cinq premiers centimètres. » La prairie est un milieu particulier, elle fait face à des contraintes qui se mettent en place progressivement et l’effet des interventions n’est pas toujours systématique (chaulage, aération, …). En rapport aux perturbations qu’elle subit, comme le surpâturage ou le tassement par le passage d’outil, le système racinaire remonte progressivement jusqu’à créer un chevelu racinaire peu épais mais très dense. Les plantes à pivot, comme le rumex, peuvent mettre en évidence des zones de compaction en profondeur ou une zone de tassement superficielle comme sur la photo d'illustration. Un système racinaire superficiel sera moins capable d’aller chercher les éléments minéraux en profondeur, il sera beaucoup moins résistant en cas de sécheresse et peu compétitif à la phase de reprise de végétation. C’est pourquoi il est important de savoir diagnostiquer l’origine du problème en observant son sol. Pour cela quelques questions sont à se poser : les horizons sont-ils distincts ou progressifs ? Le sol est-il repris en masse ? Les racines descendent-elles de façon verticale et occupent-elles tout l’espace ? L’objectif étant d’avoir un sol où la séparation entre les horizons n’est pas nette, l’aspect progressif témoigne de bons échanges air-eau, et favorisent à la fois la pénétration des racines et l’activité des microorganismes et des vers de terre.

Pas touche à l’horizon hydromorphe

L’eau qui apparait parfois lorsque l’on fait un trou dans le sol, provient en réalité de l’eau de pluie qui stagne sur un horizon hydromorphe. Souvent d’origine argileux, il s’agit d’un horizon opaque où l’eau et l’air ne peuvent circuler. On dit alors que ce sont des sols à nappes perchés. Il est important d’identifier la profondeur de cette couche qu’il ne faut absolument pas perturber lors du travail du sol, sous risque de créer des zones anaérobies où l’eau stagne (schéma) et asphyxie les microorganismes du sol. On le rappel, le travail mécanique n’est pas systématique et l’outil doit être adapté.

Cas concret dans un sol à nappe perchée

Au GAEC de la Combe Belion, ferme support de la journée technique, le profil de sol présentait des zones horizontales reprises en masse (photo ci-joint). En surface, nous pouvions observer des plantes bioindicatrices de zone d’asphyxie en milieu frais, comme par exemple la renoncule bulbeuse. D’après l’analyse laboratoire, la biomasse microbienne était peu présente (<300 mg/kg) et le pH acide (<6). Le passage d’un outil de travail du sol se justifiait dans le but de remettre de l’air, indispensable au fonctionnement des bactéries. Avec de grandes dents vibrantes, l’aérateur « herbasol » permet d’émietter l’ensemble des zones compactées. Muni de disques ouvreurs à l’avant des dents, la prairie est découpée en surface et non endommagée. Le passage de cet outil se fera en restant vigileant, car à Froideterre, les sols sont posés sur des marnes.  En réglant correctement la profondeur de travail du sol, on évitera de remonter des éléments hydromorphes dans la partie cultivée.

 

L'observation de la répartition du chevelu racinaire est riche d'enseignements.
L'observation de la répartition du chevelu racinaire est riche d'enseignements.
Dans les sols à nappe perchée, il faut éviter de toucher à l'horizon hydromorphe avec le travail du sol.
Dans les sols à nappe perchée, il faut éviter de toucher à l'horizon hydromorphe avec le travail du sol.
La fertilité du sol s'élabore en fonction des facteurs d'environnement et des pratiques culturales.
La fertilité du sol s'élabore en fonction des facteurs d'environnement et des pratiques culturales.