Lors de l’examen de la proposition de loi du député Descrozaille sur les relations commerciales, les sénateurs ont prolongé, le 15 février, l'expérimentation du relèvement du seuil de revente à perte de 10 % (SRP+10) pendant deux ans.
Ce dispositif, voté pour trois ans à l’Assemblée, avait été suspendu dans le texte voté en commission des Affaires économiques la semaine précédente. En séance, le rapporteur du texte Anne-Catherine Loisier (UC) a maintenu que le « SRP+10 » était « un chèque en blanc à la grande distribution sans contrepartie garantie pour les producteurs ». Cependant, elle déclare avoir « entendu les craintes exprimés par certains dans le contexte des négociations commerciales annuelles » qui prennent fin au 1er mars. Certains craignent que « la distribution négocie plus durement afin de conserver ses marges » alors que l’expérimentation doit prendre fin au 15 avril, a-t-elle expliqué.
Des effets incertains sur la rémunération des agriculteurs
Avant la lecture du texte, la FDSEA 70 avait alerté le sénateur de Haute-Saône Olivier Rietman (LR) sur ce sujet compliqué. Ce dernier avait consulté les deux rapports publiés en 2019 et 2022 par Daniel Gremillet, Sénateur (LR) des Vosges et président de l’Ermitage, qui pointait du doigt l’échec de la méthode : « Cette mesure a été imposée et la grande distribution essaye d’en aménager les effets en baissant les prix des MDD, de telle sorte qu’au final tout s’équilibre et que la manne supplémentaire, chiffrée à environ 600 millions d’euros, est réduite à néant », écrivait Daniel Gremillait en 2019.
Les parlementaires ne sont donc pas unanimes sur les conclusions à tirer des différents rapports d’évaluation remis par le gouvernement. « Nous avons tous des doutes, c’est pour cela que nous proposons la prolongation », a défendu le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau. L’exemption pour les fruits et légumes a été en outre maintenue, contre l’avis du gouvernement.
Retrouvez les rapport de Daniel Gremillet : celui d'octobre 2019, en collaboration avec Michel Raison et Anne Catherine Loisier ; et celui de juillet 2022, en collaboration avec Anne-Catherine Loisier. On y lit notamment : « Illustration emblématique du "ruissellement" théorique, le SRP + 10 ne semble avoir que très partiellement atteint son objectif : s’il s’est effectivement traduit par une hausse des prix pour les consommateurs finaux, le retour aux agriculteurs semblait inexistant ». D'un autre côté, le ministre de l'agriculture faisait remarquer le 15 février que « supprimer le relèvement de 10 % du seuil de revente à perte (SRP+10) pourrait relancer la guerre des prix ».
Voir aussi les débats sur les bancs de l'assemblée sur ce sujet le 18 janvier dernier.