La coopérative Feder, à Venarey-Les Laumes, en Côte-d'Or, a servi de cadre à la présentation du prototype d'une cage de contention qui tente de répondre aux enjeux de bien-être animal, de sécurité et de confort de travail accru pour les opérateurs de centres de rassemblement. Un vrai défi !
« La cage de contention, c'est l'organe vital de l'entreprise ! C'est par là que passent tous les animaux et c'est là que se fait le résultat de l'entreprise ». Ce constat c'est un directeur de centre de rassemblement qui l'a fait à Barbara Ducreux, responsable de projet au sein de l'Institut de l'élevage (Idele), et coordinatrice du projet Partenariat européen pour l'innovation Contention animale garantie ergonomique et sécurisée (PEI Cages), présenté le 17 mai au centre de rassemblement de la coopérative Feder, à Venarey-Les Laumes, en Côte-d'Or. En rappelant cette phrase, elle positionnait clairement les enjeux à l'oeuvre autour du prototype de cage de contention présenté ce jour-là. Le PEI Cages, porté financièrement par la Caisse nationale d'assurance maladie, la MSA et, l'interprofession bétail et viande (Interbev) découle d'une réflexion large portée sur les conditions de travail des opérateurs et l'amélioration de la bien traitance animale. Le pôle d'innovation en agroécologie Agronov a fédéré les acteurs utiles à la concrétisation de ce projet et à aidé dans le montage du dossier destiné à obtenir des financements.
Interventions multiples
L'activité d'allottement propre aux centres de rassemblement est apparue centrale. Les animaux sont triés pour constituer des lots homogènes qui correspondent aux attentes des clients. Dans ce cadre, les opérateurs doivent procéder à des interventions, pour valoriser au mieux les bovins ou prévenir certaines maladies. Ces interventions sont multiples : lecture des boucles d'identification, parfois remplacement de ces boucles, pesée, marquage des animaux à la bombe de peinture, traitements sanitaires, diagnostic de gestation, prises de sang ou de température, écornage, tonte sur différentes parties de l'animal... Autant de tâches qui réclament une contention de l'animal. La performance globale des centre de rassemblement se lit à travers différents critères : la santé et la sécurité des opérateurs, la qualité du travail, la productivité, la bien-traitance animale, la traçabilité des animaux, la sécurité sanitaire, la satisfaction client... La cage de contention a un impact direct sur cette performance globale. Le PEI Cages a donc été monté avec la volonté de réfléchir collectivement autour d'un système de contention individuelle pour les bovins en prenant en compte le cadre réglementaire existant, l'activité humaine et le comportement des animaux. « Il fallait apporter une réponse à une question essentielle, précise Barbara Ducreux : qu'est-ce que ce système de contention individuelle doit permettre pour les hommes et les bovins ? » Pour y répondre, une enquête en ligne a été menée auprès de tout les centres de rassemblement de France. Une analyse des usages et des pratiques a été faite dans une dizaine de ces centres, afin d'avoir les retours des utilisateurs. Les besoins identifiés ont été traduits en solutions concrètes.
Une tête qui « s'efface »
Il en a résulté un prototype, conçu en grande partie par Patrick Naudot, et fabriqué par l'entreprise Coppeaux Nicolas Mécano Soudure (CNMS), à Bard-lès-Epoisses. « On a imaginé un dispositif, précise Patrick Naudot, qui permet de libérer beaucoup plus facilement l'animal, avec une tête de contention qui, lorsqu'elle descend sur l'animal peut également reculer dans la cage, accompagnant de ce fait le mouvement instinctif de recul que l'animal peut avoir, et qui, à sa libération, remonte et ''s'efface'' dans la partie supérieure de la cage ». C'est au centre Feder de Venarey qu'il a été expérimenté, avec l'idée d'identifier des évolutions possibles ou nécessaires, en fonction des retours des utilisateurs. « Le système de contention idéal n'existe pas, souligne Barbara Ducreux, il résulte de compromis qui correspondent au mieux aux besoins d'entreprises différentes. Ce prototype, nous souhaitons que les professionnels du secteur s'en saisissent pour faire émerger des solutions auxquelles nous n'aurions pas pensé ». Nommé Bov'Adapt, le dispositif ambitionne de répondre à la fois à une problématique de santé et de sécurité au travail, et de bien-traitance animale. Des notions qui « parlent » à Jean-Paul Clerget : en charge du matériel d'élevage chez Feder, il a plus de 30 ans d'expérience dans les centres de tri et la contention. « Toutes les équipes des sites Feder ont contribué à la réflexion, souligne-t-il, à Venarey-Les Laumes mais aussi à Charolles et Montceau-lès-Mines. Un des buts recherchés était de soulager physiquement les opérateurs, qui, avec parfois plus d'une centaines d'animaux qui passent dans la cage de contention dans une journée, souffrent de troubles musculo-squelettiques (TMS). Nous avons aussi de plus en plus de femmes dans nos équipes de centres de tri. On va continuer à travailler à l'évolution de ce projet. Une bonne partie de nos idées se sont retrouvées appliquées dans le prototype ». Au-delà de Feder, d'autres entreprises ont participé à la réflexion sur sa conception : CCBE, Sicarev, Corneloup Philibert, Bourlet Carcouet Bétail, Minec. Prochaine étape pour le PEI Cages : sa candidature aux trophées des Sommets d'or du prochain Sommet de l'Elevage de Cournon d'Auvergne, en octobre.
Des critères de conception précis
Sept repères fonctionnels ont été définis pour la conception de ce prototype de cage de contention :
- permettre une entrée et une sortie efficace d'un seul animal, en favorisant au maximum l'instant de fuite du bovin, ceci pour faciliter la commande des portes
- permettre une contention rapide et efficace pour des bovins de différents gabarits. Plus l'animal est contenu, moins il s'excite et risque de se blesser
- empêcher totalement les mouvements de l'animal
- offrir à l'opérateur des conditions d'accès permettant d'effectuer différents contrôles et interventions de manière rapide, fiable et sécurisée
- permettre à l'opérateur d'avoir à portée de main les outils qui lui sont nécessaires (papiers, bombes de marquage, pinces, traitements)
- un dispositif facile à nettoyer et à entretenir
- pouvoir réaliser des opérations de maintenance dans des conditions optimales de sécurité et d'efficacité, pour assurer une bonne durée de vie de l'outil.
A cela s'ajoutaient douze critères d'évaluation de la performance du système (six concernant l'homme et six l'animal) :
- la charge physique des opérateurs (niveau d'effort requis durant la tâche, durée de la tâche, postures physiques durant la réalisation de cette tâche)
- le niveau de risque d'accident
- la charge attentionnelle nécessaire à l'opérateur lorsqu'il interragit avec le dispositif
- le temps nécessaire pour réaliser les activités
- la visibilité nécessaire pour l'opérateur lorsqu'il effectue ses tâches
- la possibilité de travailler seul ou à deux
- le niveau de stress de l'animal
- le risque de blessure ou de douleur pour l'animal
- la prise en compte du comportement naturel de l'animal
- la capacité à accueillir une diversité de gabarits
- le degré de contention de l'animal
- le degré d'immobilisation de l'animal