La définition et l’évaluer des stratégies de pâturage est une tâche complexe, compte-tenu de la difficulté d’anticiper les effets de changements de pratiques. L’utilisation d’un jeu de simulation de pâturage permet d’échanger sur les critères de décision.
Le 22 mars dernier à Amance, les participants à la demi-journée technique sur le thème du pâturage au Gaec du Lenery ont pu expérimenter un jeu de société ‘’herbager’’… Animé par Margaux Reboul-Salze, ce serious game permet de se familiariser avec le concept de pâturage tournant dynamique et d’évaluer les conséquences de la prise de décision. « Nous sommes au 15 avril, voilà les hauteurs d’herbe des différentes parcelles. C’est une année normale en termes de météo, c’est le moment de la mise à l’herbe, par quelle parcelle commencez-vous ? », questionne la conseillère Systèmes herbagers de la Chambre d’agriculture après avoir retourné la première carte de chaque paddock. Les avis sont partagés : certains lâcheraient plutôt les vaches dans une herbe courte (moins de 9 cm) tandis que d’autres privilégieraient la parcelle où l’herbe atteint déjà 12 cm… « Il n’y a pas de piège : mieux vaut commencer par le paddock où l’herbe est la plus abondante, pour éviter d’être débordé par la suite. » La suite… on y arrive quelques semaines plus tard, le troupeau ayant presque fait le tour des 12 paddocks. « C’est le moment de débrayer les parcelles les plus avancées, qui n’ont pas encore été pâturées, en les fauchant. » Une récolte sous forme d’enrubanné, au 12 mai, qui fournira peut-être un appoint alimentaire apprécié dans quelques mois !
Et la sécheresse ?
Ce support ludique est aussi l’occasion d’échanger avec Antoine Faucogney, l’un des associés du Gaec du Lenery, sur ses propres pratiques. « Quand nous avons aménagé le chemin d’accès aux paddocks de l’autre côté de la route… décaisser une belle prairie pour y mettre du tout venant, je n’étais pas bien ! Mais maintenant ce chemin fait partie du paysage. », explique-t-il. Pour lui, le pâturage tournant dynamique est un outil vraiment efficace pour suivre au plus près la pousse de l’herbe et limiter les gaspillages. Il pratique d’ailleurs le « topping », une méthode qui consiste à faucher très haut avant l’entrée des animaux dans la parcelle, pour prévenir les refus d’herbe poussée près des bouses ou moins appétente. « Franchement, c’est super, on a une pousse très homogène, visuellement c’est nickel. »
Les conséquences de la sécheresse sont largement débattues. Plusieurs écoles s’opposent : faut-il supprimer toutes les clôtures et lâcher « au large » pour minimiser la pression du troupeau en attendant le retour des pluies, ou sacrifier une ou deux parcelles, pour préserver toutes les autres ? « C’est plutôt la deuxième solution qui sera la plus appropriée, car même si les vaches n’ont rien à manger, elles vont tasser le sol, et grignoter la moindre pousse verte. Dans une optique de redémarrage de la végétation à l’automne, on a tout intérêt à sacrifier une parcelle parking plutôt que compromettre l’ensemble des paddocks. », poursuit la technicienne.
Dans la conception des paddocks pour pratiquer le pâturage tournant dynamique, la question de l’abreuvement revêt aussi une place centrale, car qui dit plus de paddocks, dit plus de point d’eau ! Le Gaec du Lenery a mis en place une solution ingénieuse, avec un point d’eau pour quatre paddocks, au carrefour des clôtures. Pour éviter de faire passer un courant électrique au-dessus de l’abreuvoir, un système de portillons à 45° est disposé autour du point d’eau.