Difficile à détecter, l’hypocalcémie chronique a des répercussions sur la santé et la production de la vache laitière, et des impacts économiques majeurs. Sa prévention s’appuie sur une stratégie de maîtrise de l’alimentation pendant la phase de tarissement : densité énergétique modérée et équilibre minéral de la ration.
Une étude française de 2014 a montré que l’hypocalcémie subclinique touche environ un quart des vaches laitières primipares et la moitié des multipares. Une prévalence donc bien supérieure à celle de la forme clinique – connue aussi sous le nom de fièvre de lait – et dont l’impact économique est estimé quatre fois supérieur, à travers ses conséquences sur la santé des animaux et leur production laitière. Le calcium est un des macroéléments, ou éléments minéraux majeurs, incontournables au bon fonctionnement de l’organisme, et il joue un rôle physiologique déterminant.
Santé de la mamelle, tonicité du rumen
Une carence en calcium importante provoquera fièvre de lait, boiterie chronique, fractures osseuses, ostéomalacie (déminéralisation des os). Un excès, à contrario, réduira l’absorption du cuivre et du zinc. Dans la sphère de la santé de la mamelle, une carence en calcium induira une moindre tonicité des tissus responsables de la fermeture du trayon. Conjugué avec une dépression immunitaire, cet effet favorisera l’apparition et la gravité des mammites. Au niveau digestif, la fréquence et l’intensité des contractions ruminales seront affectées, d’où une baisse de l’ingestion, un risque accru de déplacement de la caillette, des réserves lipidiques davantage mobilisées pour assumer la production laitière et une éventuelle cétose… La reproduction peut aussi être affectée, via des défaillances de tonicité de l’utérus, et des risques accrus de métrites.
La période critique du vêlage
Les causes favorisant l’hypocalcémie sont très liées à la conduite du troupeau et en particulier au pilotage de l’alimentation des vaches taries. Un apport excessif de calcium dans la ration durant le tarissement provoque en effet une suspension des mécanismes hormonaux de régulation de la calcémie sanguine. Or juste après le vêlage, la production de colostrum entraîne une forte demande en calcium. La fréquence de troubles hypocalcémiques augmente aussi avec le nombre de lactations, car avec l’âge, les vaches perdent une partie de leur capacité à absorber le calcium par voie intestinale et à mobiliser leur calcium osseux. Une alimentation riche en potassium (un cation) pendant la période de transition constitue également est un facteur favorisant, car un taux élevé de cations dans le sang augmente le pH sanguin et inhibe en partie la capacité à mobiliser le calcium osseux. De même, une trop grande richesse de la ration en phosphore inhibe une des hormones régulant le calcium sanguin…
Conduite alimentaire spécifique
Une conduite alimentaire spécifique pendant le tarissement reste l’axe prioritaire de prévention de l’hypocalcémie clinique comme chronique. Elle s’appuie sur une séparation effective du lot des vaches taries du reste du troupeau. Ainsi, on pourra limiter les apports en calcium pendant les quatre semaines qui précèdent le vêlage, en jouant sur la composition de la ration. Pour cela, on limitera la distribution des fourrages riches en calcium, tels que légumineuses (luzerne, trèfle), crucifères (chou, colza) ou pulpe de betterave. On veillera également à éviter les excès de phosphore et à prévenir les déficits en magnésium. Limiter les apports de potassium reste plus complexe, car les fourrages sont naturellement assez bien pourvus dans cet élément. Enfin, la densité énergétique de la ration distribuée aux taries est aussi à surveiller. Une suralimentation énergétique favorise la constitution de réserves lipidiques et prédispose à l’apparition du syndrome de la vache grasse. Le foie, engorgé, voit son efficacité diminuer et cela affecte la synthèse de vitamine D.