La sécheresse et les vagues de chaleur successives du début de l'été ont hâté le cycle du maïs. Avant toute décision d’ensiler, un diagnostic préalable s’impose. Arvalis propose quelques clés pour la conduite des chantiers, selon les stades auxquels sont intervenus les déficits hydriques et excès de températures.
En conditions normales de végétation, l’objectif général est d’ensiler un maïs autour de 32-33 % de matière sèche plante entière. C'est le meilleur compromis entre le rendement, la valeur alimentaire et les conditions de conservation au silo. A ce stade, les grains sont entre 48 et 42 % d'humidité, l'appareil végétatif présente encore des feuilles vertes et la teneur en matière sèche des tiges et feuilles est entre 20 et 25 %.
Surveiller l’évolution de la sénescence
En parcelles affectées par un déficit hydrique, l’objectif est de valoriser au mieux la situation en essayant de faire les meilleurs compromis. Il est nécessaire de récolter une plante « ensilable », c'est-à-dire à un taux de matière sèche qui permet la conservation, avec des feuilles encore vertes pour faciliter le tassement et le processus d’acidification, et sans trop perdre de chances d’augmentation de rendement si les conditions de culture redevenaient favorables. Dans des conditions chaudes, les plantes évoluent vite, il faut alors ne pas se faire dépasser par la rapidité de la sénescence et l’évolution de la teneur en MS des plantes. Arvalis propose justement une grille d’appréciation du taux de matière sèche plante entière par l’observation des grains, à télécharger.
Conséquences du stress hydrique
Le déficit hydrique a des conséquences sur la mise en place du rendement. Souvent associé à des températures élevées, il génère en plus une augmentation de la température du couvert par défaut de transpiration des plantes (fermeture des stomates). Les premiers symptômes sont les enroulements de feuilles, qui se dessèchent si le stress persiste. Selon le stade auquel survient le stress hydrique, les conséquences sont différentes : croissance limitée de l’appareil végétatif, avortement des grains, remplissage limité des grains, dessèchement précoce de la partie « tige + feuilles », qui limite le rendement et accélèrera la maturité. En Franche-Comté, c’est plutôt ce dernier cas de figure qui prédomine.
Établir un diagnostic de la situation
Avant de prendre la décision d’ensiler, il convient de faire un diagnostic au champ, en veillant à bien rentrer à l’intérieur des parcelles où les maïs peuvent être très différents des bordures. Ce diagnostic prend en compte le stade des plantes, le nombre de grains par m2, l’aspect de l’appareil végétatif et son potentiel d’évolution.
Il faut d'abord estimer le potentiel de la culture au travers des épis mis en place et du niveau de remplissage des grains. Dans un deuxième temps, il faut estimer le niveau de dessèchement de la partie « tige + feuilles ». Plus le nombre de grains mis en place est élevé, plus le potentiel de rendement est élevé et plus on aura intérêt à attendre et à favoriser le remplissage des grains sous réserve qu’il reste des feuilles fonctionnelles (vertes). Le retour de la pluie sur une plante qui garde quelques feuilles vertes permet d’assurer une photosynthèse suffisante pour la poursuite du cycle de la plante. Le rendement final dépendra du développement plus ou moins important et régulier des plantes, du nombre de grains par m2, et du dessèchement plus ou moins prononcé de l’appareil végétatif.
Plus la partie « tige + feuilles » conserve des feuilles vertes, plus la culture aura de chance d’évoluer normalement, surtout en cas de retour des pluies. En cas de stress hydrique, outre le phénomène d’enroulement de feuilles sur elles-mêmes (fermeture des stomates), les feuilles du dessous de l’épi seront les premières à se dessécher. Il convient de surveiller l’évolution des feuilles vertes pour conserver des conditions d’ensilage sans trop de risque. Une plante aujourd’hui complétement desséchée n’a pas d’avenir. Elle ne repartira pas, même en cas de retour de la pluie.
La décision d’ensiler s’avère plus délicate pour les parcelles comportant des zones sèches et des zones encore vertes. Dans ces situations, c’est finalement le ratio entre la surface desséchée (dont le rendement n’augmentera pas) et la surface encore verte (dont on peut encore attendre quelque chose) qui doit guider la décision. La connaissance des potentiels des parcelles est primordiale !
Envisager deux chantiers
Si la part des surfaces de maïs stressées est significative sur l’exploitation : plutôt que de trouver un mauvais compromis pour la date de récolte, il vaut mieux envisager deux chantiers d’ensilage. En récoltant d’abord les parcelles, ou les parties de parcelles, les plus avancées.
Sur quels critères s’appuyer pour décider ? Il est nécessaire de juger de l’état de desséchement de l’appareil végétatif et surtout de son évolution récente en fonction des températures et des éventuelles précipitations (récentes ou à venir). En conditions normales ou proches de la normale, à l’approche de la « maturité fourrage », c’est l’évolution du remplissage du grain qui entraîne l’élévation de la teneur en MS de la plante entière. L’effet dû au dessèchement de l’appareil végétatif reste modéré. Même avec 75 % de feuilles desséchées (couleur brune), la teneur de la fraction « tiges + feuilles » n’excède pas 31 – 33 % MS. Dans l’appréciation visuelle, il convient donc de ne pas accorder trop de poids à l’état du feuillage. Le diagnostic se fera au regard du nombre de grains viables sur l’épi et du gabarit de la plante.
Exemple 1 : une plante de grand gabarit (> 2,5 m) mais avec un épi ne présentant pas ou peu de grains (< 50 à 100 grains), ne verra sa teneur en MS atteindre ou dépasser 30 % que lorsque plus de la moitié de ses feuilles seront complètement desséchées (couleur brune). Notons également la grande sensibilité de la teneur en MS de ces plantes en fonction des conditions climatiques du moment. Une rosée abondante ou une pluie peuvent faire reculer fortement la teneur à MS aux alentours de 20 %, l’effet « tampon » de l’épi n’étant pas ou peu assuré.
Exemple 2 : à l’opposé, une plante de gabarit moyen à petit (< 2 m) et avec un épi bien rempli (> 300 grains) verra sa teneur en MS davantage dictée par la maturité du grain que par l’état de son appareil végétatif. Il conviendra alors d’accorder davantage de jugement à l’observation des grains qu’à celle du feuillage.
Enfin, dans le cas d’un retour de pluie après une période sèche, la plante va reprendre de l’humidité par sa partie « tige + feuilles » (phénomène d’éponge) et le taux de MS de la plante entière va alors baisser de plusieurs points, en fonction du rapport grains / « tige + feuilles ».