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Tournesol : comment éviter le gaspillage d’engrais ?

Bien enraciné, le tournesol est capable de mobiliser facilement l’azote minéral du sol pour couvrir une grande partie de ses besoins.
Bien enraciné, le tournesol est capable de mobiliser facilement l’azote minéral du sol pour couvrir une grande partie de ses besoins.

Le tournesol n’a pas besoin de beaucoup d’azote, mais un apport mal dosé peut nuire à son rendement. Découvrez deux méthodes pour ajuster la fertilisation et éviter les excès dans cet article de Nicolas Latraye, de Terres Inovia.

Le tournesol est une culture sobre, capable de puiser efficacement l’azote dans le sol. La fertilisation azotée vise à compléter les fournitures du sol si nécessaire. L’apport des autres éléments minéraux (phosphore, potasse, bore) est également à adapter selon les réserves du sol. Pourtant, une fertilisation mal raisonnée peut entraîner des problèmes : végétation trop dense, maladies, verse… Pour éviter le gaspillage et maximiser le rendement, deux solutions existent : la méthode des bilans et l’Héliotest, un outil visuel simple et efficace. On fait le point. 

La fourniture en azote par le sol est généralement comprise entre 120 et 210 unités ; rarement inférieure à 80 unités. Avec un besoin unitaire de 4.5 unités d’azote par quintal de graines produites, pour des potentiels de 30-35 q/ha, l’azote n’est plus limitant à partir de 150 unités absorbées. Au regard des quantités importantes fournies par le sol, il est nécessaire de piloter son azote sur la culture et éviter les sur fertilisations pour limiter l’exubérance de végétation (favorisant le stress hydrique), le développement des maladies, et la verse.  

Deux méthodes pour éviter de sur-fertiliser 

Deux méthodes existent pour piloter son azote : la méthode des bilans, prenant en compte les reliquats au semis et l’objectif de rendement, et l’héliotest, reposant sur une méthode visuelle corrélée à l’objectif de rendement (voir encadré).  

Quantité d’azote à apporter en fonction de l’estimation des reliquats et de l’objectif de rendement : grille de décision
     Objectif de rendement 
    25 q/ha
(sols superficiels) (1)
35 q/ha
(sols profonds) (2)
Reliquats d’azote au semis  Faible (30 U)  40 à 80 U  80 à 100 U
Moyen (60 U) moins de 40 U 40 à 80 U
Elevé (90 U) 0 U

 moins de 40 U

(1) argilo-calcaire superficiel, sol sableux, cranette…
(2) limon, limon argileux, argile limoneuse, craie… 

Si la minéralisation est forte, choisir la valeur basse de la fourchette et inversement 

Héliotest est un outil simple et pratique pour raisonner la fertilisation azotée du tournesol à la parcelle en évaluant les besoins réels de la plante. Basée sur un indicateur visuel simple, la méthode Héliotest vise à répondre aux besoins réels en azote de la plante. L’apparition d’une différence visuelle (hauteur, volume, couleur) entre une bande fertilisée au semis et le reste de la parcelle traduit une carence en azote sur la partie non fertilisée. Le stade d’apparition de cette différence permet d’estimer les fournitures d’azote par le sol pour tout le cycle de culture. Par ailleurs, en fonction de l’objectif de rendement, on peut estimer les besoins de la culture : le tournesol doit consommer 4.5 kg d’azote absorbé pour produire un quintal. A partir de ces deux éléments (stade d’apparition de la différence visuelle et objectif de rendement), Héliotest donne directement la dose à apporter en végétation : tableau décisionnel ci-dessous.

Tableau de décision Héliotest : dose à apporter en fonction du stade du tournesol auquel la différence visuelle est observée entre la bande azotée et le reste de la parcelle et selon l'objectif de rendement

Différence visuelle observée à Objectif de rendement
  20 q/ha 30 q/ha 40 q/ha
7-8 feuilles 0 u 40 u 100 u
9-10 feuilles 0 u 20 u 80 u
11-12 feuilles 0 u 0 u 60 u
13-14 feuilles 0 u 0 u 40 u
Pas de différences avant 14 feuilles 0 u 0 u 0 u

Réalisez les apports en végétation 

Les besoins en azote de la plante augmentent rapidement environ 1 mois après la levée, l’essentiel de l’absorption ayant lieu du stade bouton à début floraison. Par conséquent les apports en végétations sont au moins aussi bien valorisés que les apports au semis, étant donné la meilleure synchronisation avec les besoins de la plante. Parmi les avantages de l’apport en végétation, la possibilité de réajuster la dose d’apport selon l’état de la culture, en particulier du peuplement. 

Afin de limiter les risques de brûlure, il est recommandé de privilégier les formes solides, par rapport aux formes liquides. Cette application est à privilégier par temps sec, et avant l’apparition du bouton (viser 14 feuilles maximum). En cas de recours à la solution liquide, l’usage de pendillards est recommandé. 

Phosphore, potasse et Bore, des apports à piloter en fonction de la fourniture du sol 

Le tournesol est une culture peu exigeante en phosphore et moyennement exigeante en potasse. De ce fait, il est possible de réaliser des impasses si la teneur du sol est élevée, même pour des objectifs de rendement élevés.  A noter que les essais d’apport localisé des éléments phosphore et potasse sur tournesol n’ont pas démontré d’intérêt particulier. 

Apport de phosphore (P2O5) et potasse (K2O) : dose d’apport en fonction de la teneur du sol et de l’objectif de rendement.
Objectif de rendement P2O5  K2O 
  Teneur du sol Teneur du sol
  Faible Moyenne Elevée Faible Moyenne  Elevée
25 q/ha  40 U  30 U 0 U 40 U 30 U 0 U
35 q/ha  60 U  40 U  0 U  60 U  40 U  0 U 

En l’absence d’apport en année n-1 ou n-2, les quantités peuvent être augmentées de 10 u de P2O5 et de 20 u de K2O. En cas d’exportations des pailles de céréales avant la culture, rajoutez à ces chiffres, et seulement en sols pauvres, 10 à 20 u de P2O5 et 30 à 40 u de K2O. Se référer aux grilles diffusées par le COMIFER

Pour le bore, les apports sont à raisonner en fonction de la fourniture de son sol, les sols superficiels ou filtrants étant les plus à risque. Plusieurs facteurs aggravants sont à prendre en compte tels que le retour fréquent de cultures exigeantes (tournesol, betterave) ainsi que les mauvaises structures du sol. Dans ces situations à risques, un apport préventif peut être réalisé au semis ou de préférence en végétation. Tout apport de bore après l'apparition des symptômes est inutile, car les effets de la carence sont alors déjà irrémédiables. 

Apport de bore (B) : modalités et dose d’apport
Apport Stade Forme Dose de bore (B)
Au sol Incorporer ou pas avant le semis (1)  Solide ou liquide 1.2 kg /ha (3) 
En application foliaire  Entre les stades « 10 feuilles » et LPT (1) (2) Liquide : apporter au moins 200 l/ha de bouillie  300 à 500 g/ha (4) 

(1) Peut être réalisé à l'occasion du désherbage ou de l'application du fongicide. 
(2) LPT : limite de passage du tracteur. Le tournesol mesure 55 à 60 cm. 
(3) Chélal B : 250 g B/ha au sol - 200 g B/ ha en application foliaire 
(4) Soit environ 3 l de produit liquide à 150 g/l de bore