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Accords avec le Mercosur : NON c'est NON

Arnaud Grandidier, président de la FDSEA et Louis Wicky, président des JA, ont expliqué au directeur du Buffalo Grill les motifs de leur désaroi. Crédit photo : A.Coronel
Arnaud Grandidier, président de la FDSEA et Louis Wicky, président des JA, ont expliqué au directeur du Buffalo Grill les motifs de leur désaroi. Crédit photo : A.Coronel

Malgré les promesses du président de la République, les résolutions votées par l'Assemblée nationale... le processus de ratification des accords commerciaux entre l'UE et les pays du Mercosur poursuit inexorablement son cours. De quoi exacerber la colère des éleveurs, qui refusent que leur gagne-pain serve une nouvelle fois de monnaie d'échange. A l'appel de la FNSEA, une cinquantaine d'agriculteurs de Haute-Saône ont donc conduit une action "coup de poing" devant le Buffalo Grill de Pusey.

« N'importons pas l'agriculture dont nous ne voulons pas ! », résume Laurent Isabey, secrétaire général de la FDSEA de Haute-Saône, après avoir énuméré les distorsions de concurrence entre l'agriculture brésilienne et l'agriculture française : normes environnementales, normes sanitaires, normes sociales... « Sans parler du fait que ces carcasses vont traverser l'Atlantique pour atterrir dans nos assiettes ! » Alors que la ré-autorisation de l'emploi d'un néonicotinoïde dans la loi Duplomb a largement fédéré les oppositions, les leaders syndicaux de Haute-Saône pointent l'incohérence des accords internationaux qui ouvrent les frontières à des denrées alimentaires produites dans des pays moins-disant en matière d'emploi des produits phytosanitaires, d'hormones de croissance, de bien-être animal... sans parler du volet social. « L'ouverture du marché européen à des milliers de tonnes de viande brésilienne va déstabiliser le marché intérieur, et après, on aura beau dire qu'on n'est pas capables de nourrir nos concitoyens ! », s'insurge Arnaud Grandidier, le président de la FDSEA. « C'est déjà ce qui s'est passé avec la filière ovine et les volailles : on a perdu notre souveraineté alimentaire. » De fait, la France est de plus en plus dépendante des importations de viande, notamment bovine et volaille, un phénomène qui s'est accentué ces dernières années, laissant une part importante de la viande consommée d'origine étrangère. Cette dépendance résulte d'une baisse de la production nationale, tandis que la consommation, notamment de volaille, reste élevée. En conséquence, la France, autrefois autosuffisante, importe plus de viande qu'elle n'en exporte, affectant l'économie des filières françaises face à la concurrence européenne et aux normes de l'UE. Devant le Buffalo Grill de Pusey, une balle de paille est déroulée, et la vache charolaise Royale, appartenant au Gaec Michel de Mersuay, parée d'un drapeau bleu-blanc-rouge, est attachée à la porte d'entrée... A la bombe, les JA refont les couleurs du totem, des bisons, avant d'inscrire les slogans de leurs revendications sur les murs du restaurant. Par exemple : « Je suis Français, je mange français ! », ou bien « Non au Mercosur ! » Une cinquantaine de manifestants sont là, à l'appel de la FDSEA et des JA, relayant le mot d'ordre national à travers cette action coup-de-poing symbolique, pour exprimer une nouvelle fois le désarroi d'un monde agricole, confronté aux incohérences des politiques nationales et européennes. « Une fois de plus, c'est le secteur agricole qui fait les frais des négociations commerciales », déplore Arnaud Grandidier.

Pénurie de viande

La décapitalisation du cheptel bovin français a pris une telle ampleur qu'elle a entraîné une pénurie sur le marché intérieur de la viande et une hausse spectaculaire des cours depuis quelques mois. « Le prix payé aux éleveurs a augmenté de 100%, tandis que la hausse répercutée aux consommateurs sur les prix en rayon est de l'ordre de 4%, sans que ça se traduise par une baisse de la consommation. Ce qui prouve qu'on avait raison pendant toutes ces années de revendiquer un juste prix, qui permette de couvrir les charges et de favoriser le renouvellement des générations. », synthétise Emmanuel Aebischer, l'ancien président de la FDSEA. Louis Wicky, le président des Jeunes Agriculteurs de Haute-Saône, fait également part de ce point au directeur du Buffalo Grill. « Tous ces jeunes aujourd'hui présents devant votre restaurant veulent vivre décemment de leur travail. L'élevage entretient le territoire. L'importation de viandes produites à l'étranger, moins chères, détruit nos exploitations, mais aussi tous les emplois qui en dépendent, et ce sont vos consommateurs. » Arnaud Grandidier présente une affiche publicitaire de 2020 pour l'american BBQ vantant le boeuf 100% français... mais en 2025, une bonne partie des viandes bovine à la carte du Buffalo Grill de Pusey proviennent des Pays-Bas. « Et demain, votre groupe aura la possibilité de s'approvisionner en viandes d'origine sud-américaine, encore moins chères, ce qui va déstabiliser la filière française de l'élevage. » Un argumentaire que veut bien entendre le dirigeant du restaurant, qui explique cependant qu'il n'a pas la main sur la stratégie de la chaîne d'approvisionnement des magasins de la marques.

Arnaud Grandidier, président de la FDSEA et Louis Wicky, président des JA, ont expliqué au directeur du Buffalo Grill les motifs de leur désaroi. Crédit photo : A.Coronel
Non au Mercosur ! Une revendication limpide qui peine pourtant à être entendue par nos dirigeants. Crédit photo : AC
Le bison emblématique de l'enseigne Buffalo Grill a été taggé par les JA. Crédit photo : AC